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Bienvenue dans mon petit monde. Je dédie ce blog à tous ceux qui, comme moi, aimeraient que tout commence par " il était une fois...". De la lecture à l'écriture, il n'y a qu'un pas, dit-on. Certes, mais il n'est pas aisé à accomplir. Et à quoi servirait d'écrire si ce n'était que pour soi ? Alors, je vous propose de venir découvrir des extraits de mes livres, mes nouvelles et mes poèmes. Humour, tragédie, Fantasy, j'espère que vous trouverez un univers qui vous correspond. Et n'hésitez pas à me laisser un petit commentaire. SOPHIE

LILY

LILY

Les souvenirs nous happent au moment où l’on s’y attend le moins…

Ce jour-là, j’avais un rendez-vous d’affaires très important pour moi, donc pas de temps ni de place pour la rêverie. J’étais même particulièrement préoccupé, mon entreprise traversant alors une très mauvaise passe. J’espérais ardemment faire enfin signer un gros contrat à un client particulièrement difficile.

Nous étions convenus de nous retrouver dans un restaurant du centre-ville. J’arrivai un peu en avance afin d’avoir le temps de relire certaines clauses éminentes du document dont la validation pouvait sauver mon avenir professionnel et celui de mes quatre fidèles collaborateurs.

Je suis architecte d’intérieur et, en raison de la conjoncture, les marchés juteux se font rares, raflés –pour la plupart- par les gros cabinets de la capitale. Ce marché était ma dernière chance !

J’étais donc en train de m’escrimer sur les paragraphes et moult alinéas se succédant sur l’épais dossier préparé par mon avocat d’affaires, lorsqu’un effluve inattendu vint distraire ma concentration pourtant toute entière tournée vers ma relecture.

Dans ce restaurant chic où les couteux parfums à la mode bousculent régulièrement les narines, cette fragrance rare et pleine d’humilité me fit lever la tête et fermer les yeux.

Un souvenir d’une époque remontant à ma tendre enfance vint alors s’insinuer en douceur dans tout mon être, gommant l’instant présent, me replongeant dans les délices d’un moment suspendu : cette senteur, c’était celle de ma mère. Une exhalaison fleurie, simple et sans chichi, mais si belle justement dans sa simplicité et sa fraîcheur, que je ne pus l'accueillir sans croire que je venais juste de fêter mes cinq ans et que maman me serrait tout contre elle pour me dire combien elle était fière de moi. Cette odeur, que j’avais alors volée pour toujours contre un doux baiser, était celle du jasmin. Maman portait ce que l’on nommait eau de Cologne, car elle n’avait pas les moyens de s’offrir du parfum. Pourtant, je trouvais qu’en plus d’être la plus jolie de toutes les mères, elle était aussi la seule qui embaumait la senteur la plus magique qui fût : dans mon imaginaire d’enfant, une telle parure olfactive aurait parfaitement convenu à la Reine des Fées ! Pas étonnant que papa, mon héros, l’aie choisie entre toutes ! Les mères de mes copains pouvaient bien exhiber leurs parfums capiteux aux noms prétentieux, je les jugeais écœurants et artificiels. L’institutrice nous avait raconté l’histoire de Narcisse, cet homme transformé en fleur. J’étais convaincu que le contraire s’était produit avec maman. Elle était une fleur devenue humaine. Son prénom en était la preuve : Lily. Mais même la plus belle des fleurs nous quitte un jour et ma mère tendrement chérie était au paradis des fées depuis deux décennies déjà. Elle avait laissé un vide douloureux dans ma vie. Toutefois,  ce que je venais  d’éprouver était étonnement apaisant et réconfortant. Je rouvris les yeux pour découvrir qui était celle à qui je devais cette merveilleuse distraction. Une femme devait porter la même senteur que ma mère... Les tables proches étaient encore  inoccupées et le ballet des serveurs menant les convives à leur place n’avait pas encore commencé. D’où avait bien pu provenir cet arôme qui ne pouvait être confondu avec aucun autre ?

Mon client finit par arriver et je dus me consacrer à des préoccupations plus terre à terre. Je sus être convainquant, remportai le marché et sauvai ainsi mon entreprise du dépôt de bilan. Mais j’avais –sans que je le comprisse tout de suite- gagné un tout autre combat : je constatai par la suite, qu’à chaque évènement essentiel de mon existence, cette senteur florale me revenait comme par enchantement : lorsque je rencontrai la femme de vie, à la naissance de chacun de mes deux enfants, mais aussi à la mort de mon père et, enfin, lorsque j’eus ce grave accident de voiture.

Je suis demeuré dans le coma une semaine entière et c’est un arôme de fleurs blanches qui m’a fait revenir des limbes dans lesquelles je m’enfonçais inexorablement.

Les docteurs, persuadés un temps que je ne marcherai plus jamais,  se disent étonnés par ma volonté et mes progrès quotidiens. Je me bats pour ma femme, pour mes enfants, mais grâce à la fée Lily.

Sans nul doute, le jour de mes cinq ans, elle m’a donné à respirer une fragrance véritablement magique : celle de l’amour inconditionnel et sans fin que seule une mère peut offrir. Et, depuis l’Au-Delà, par la grâce du souvenir de cette eau de Cologne au jasmin,  elle me fait savoir qu’elle sera toujours à mes côtés pour accompagner les beaux ou les éprouvants moments de mon existence.

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