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Bienvenue dans mon petit monde. Je dédie ce blog à tous ceux qui, comme moi, aimeraient que tout commence par " il était une fois...". De la lecture à l'écriture, il n'y a qu'un pas, dit-on. Certes, mais il n'est pas aisé à accomplir. Et à quoi servirait d'écrire si ce n'était que pour soi ? Alors, je vous propose de venir découvrir des extraits de mes livres, mes nouvelles et mes poèmes. Humour, tragédie, Fantasy, j'espère que vous trouverez un univers qui vous correspond. Et n'hésitez pas à me laisser un petit commentaire. SOPHIE

MARIAGE

MARIAGE

Les Puys de l’Orialt recélaient maints petits villages frileusement blottis au creux des plaines vallonnées tout au Nord des Toal Gahn. L’un de ces modestes hameaux portait le nom de Ringoann et ne rassemblait que quelques fermettes, abritant des familles de paysans, qui vivaient chichement de cultures et d’un peu d’élevage. A l’horizon Est, des montagnes peu élevées, les Agurs, annonçaient les Terres de l’Algave. A l’Ouest, à moins de deux jours de cheval,  bourdonnait la ville commerçante de Perfield. La relative proximité de l’Emmerfréis  se faisait cruellement sentir : il  gelait souvent  à pierre fendre durant l’hiver et les orages d’été gâtaient les maigres récoltes une année sur deux. 

Mais au cœur de cette existence âpre et laborieuse, s’invitaient parfois de courtes -mais non moins précieuses- embellies. 

Ainsi en fut-il du mariage de Weal et Keyra.  Ces deux-là étaient inséparables depuis l’enfance et tous à Ringoann savaient que le jour viendrait, où ils s’uniraient comme mari et femme.

Or donc, un matin de printemps, un derwid à la mine austère patienta sous la voûte de quatre chênes séculaires. A ses côtés, le futur époux peinait à cacher sa nervosité. Un peu plus loin, ses parents échangeaient des regards émus, tandis que ses sœurs  pouffaient en chuchotant et que ses jeunes frères trépignaient, déjà pressés de retourner jouer. Tout à coup, une procession joyeuse parut, entourant la future épousée de deux files irrégulières et animées. La coutume voulait que la fiancée soit menée par sa propre famille, du seuil de la maison où elle avait vu le jour jusqu’à sa demeure de femme, près de laquelle serait prononcé le serment de mariage. Weal avait choisi une petite trouée dans une futaie située juste à l’entrée du village et y avait construit de ses mains une maisonnette à l’ossature de bois et au toit de chaume.

Telle était la tradition : tout homme souhaitant convoler devait fabriquer seul le foyer qui abriterait sa femme et ses enfants à venir. Heureusement, la forêt –offrant gratuitement la matière première- était toute proche et le berger, courageux et adroit.

En chemin, les amis et voisins, nombreux et bruyants, s’étaient joints au convoi familial, composé des parents, grands-parents et des six frères de Keyra. Le soleil, aidé du vent, jouait avec les feuilles des arbres et parait la jeune fille de multiples petites lueurs colorées et dansantes, alors qu’elle s’avançait lentement vers son futur époux.  Keyra fermait les yeux, lorsque la lumière l’éblouissait trop et souriait à pleines fossettes à ceux qui lui adressaient des vœux de bonheur et d’encouragement. Elle portait une simple couronne de fleurs sauvages ceinte sur son front ; elle avait longuement  peigné ses longs et fins cheveux châtains, les laissant flotter librement dans son dos, en une moire ondulante. Elle avait revêtu son corps mince d’une longue robe sans manches, qu’elle avait  cousue elle-même dans le lin le plus fin, que sa mère avait pu lui procurer au marché des tisseurs de Perfield, dépensant pour sa fille unique plus qu’en une année pour elle-même. Et sur cette robe, Keyra avait brodé avec soin un myosotis, sa fleur préférée. Elle ne possédait  nulle richesse, hormis la fraîcheur de ses seize ans et ses yeux : ils étaient d’une couleur rare et chaude, ambrés et  lumineux comme le miel.

Enfin, elle s’immobilisa à hauteur de Weal, mais n’osa le regarder en face, tandis que le derwid prononçait les mots solennels. Ensemble, les jeunes gens répétèrent à haute voix les vœux sacrés des épousailles et, lorsque le derwid attacha symboliquement le  poignet féminin à celui du jeune homme avec un lien tressé, le regard d’ambre se posa enfin sur celui de son mari.  Et le berger brun, qui était à peine plus âgé que Keyra, se perdit dans les yeux de celle qui venait de se donner librement à lui.

Cette union fut suivie de l’une des fêtes les plus joyeuses qui fût. Parce que les mariés, ainsi que  leurs familles respectives, étaient appréciés de tous,  chacun avait apporté une petite contribution pour que ce soit un véritable repas de noce et était bien décidé à s’amuser et à danser jusqu’au matin. Ce fut la toute dernière fois, à Ringoann, que fifres et rires retentirent.  

 

Extrait de la Légende du Norsgaat - LA TERRE, MEROCH (livre 1)
 

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