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Bienvenue dans mon petit monde. Je dédie ce blog à tous ceux qui, comme moi, aimeraient que tout commence par " il était une fois...". De la lecture à l'écriture, il n'y a qu'un pas, dit-on. Certes, mais il n'est pas aisé à accomplir. Et à quoi servirait d'écrire si ce n'était que pour soi ? Alors, je vous propose de venir découvrir des extraits de mes livres, mes nouvelles et mes poèmes. Humour, tragédie, Fantasy, j'espère que vous trouverez un univers qui vous correspond. Et n'hésitez pas à me laisser un petit commentaire. SOPHIE

L'HISTOIRE D'ARAM, L'HOMME-OURS

L'HISTOIRE D'ARAM, L'HOMME-OURS

Monna était une jeune bergère et vivait dans le village paisible qui jouxtait la montagne. Elle mena son troupeau non loin de mon antre un bel après-midi de printemps. Elle avait découvert un champ herbeux à souhait et vint régulièrement, par la suite, y faire brouter ses animaux.

Comme d’habitude, je ne me montrais pas, me contentant de l’observer de loin. Elle avait un visage doux et chantait à ravir. Grâce à elle, la beauté des mots et de la musique m’ouvraient de nouveaux horizons. Et puis, je la trouvais si gracieuse, si belle ! Mais au fil du temps, elle finit par ressentir une présence. Elle se mit à jeter des regards nerveux par-dessus son épaule et je craignis qu’elle ne décidât de ne plus venir.  Je prenais un tel plaisir à la regarder et l’écouter, que si cela s’était produit, je crois que je me serais laissé vraiment mourir.

Alors, j’eus l’idée de lui laisser de menus cadeaux : une petite bourse en peau de daim, que j’avais fabriquée de mes mains,  des fraises sauvages,  parfois du miel, afin qu’elle comprenne que je ne lui voulais aucun mal. Elle le comprit si bien qu’elle me laissa, à son tour, des présents : des petits pains qui faisaient mon régal, des tresses fleuries, dont je parais mon antre. L’autel pour nos présents était une grande pierre ronde et plate, sur laquelle elle s’asseyait parfois, pour regarder la vallée et songer. Elle ne manquait jamais de me remercier à voix haute, pour me montrer qu’elle savait que j’étais là, quelque part et qu’elle n’avait plus peur de moi. Quant à moi, en plus de me faire redevenir humain, elle m’apprenait le bonheur. Jamais je n’avais eu d’ami avant elle, Giann me détestant presqu’autant que son père.

Puis un soir, en courant après l’une de ses bêtes, Monna disparut de mon champ de vision et je crus qu’elle était tombée dans le ravin. Le cœur battant la chamade, je descendis de ma cachette et me précipitai : elle était allongée sur une crête rocheuse qui avait arrêté sa chute, mais elle ne semblait pas gravement blessée, seulement inconsciente. Je la portais dans mes bras, lorsqu’elle a rouvert les yeux, me souriant. Je ne m’étais pas transformé et elle ne vit donc alors qu’un sauvageon de son âge ou à peu près. Elle m’avoua plus tard qu’elle brûlait tellement de voir son mystérieux et timide ami, qu’elle avait fait semblant de tomber.  Je ne pouvais lui dire pourquoi je vivais ainsi caché. Je n’aurais pas supporté de lire l’horreur sur son visage. Je lui parlai seulement d’un lourd secret, l’adjurai de taire mon existence à tous et, devant mon insistance,  elle promit. Depuis le temps que je la regardais vivre, je savais qu’elle avait bon cœur. Je le voyais à la façon dont elle traitait ses bêtes, je le comprenais aux  paroles de ses chansons. Je mis ma vie entre ses mains, mais je ne le regrettai jamais : elle respecta la parole donnée.

Quelques rares fois,  je ne pus venir à nos rendez-vous.  Les « transformations » me prenaient encore parfois par surprise : un jour, en me blessant sérieusement avec une branche cassée,  un autre, parce que j’avais été attaqué par  une femelle lynx avec un petit. Mon odeur d’humain l’avait mise colère, celle de la bête,  lorsque je me transformai, la fit déguerpir. Monna était si inquiète de mes absences, qu’elle me questionnait alors plus que de coutume. Je n’aimais pas lui mentir et sa réaction prouvait qu’elle s’était attachée à moi. Elle aurait voulu savoir où je vivais, mais je n’osais l’emmener, craignant qu’un jour elle ne surprenne le monstre qui se dissimulait en moi. Je n’aurais pas dû douter d’elle : un soir d’hiver, nous avons été attaqués par une meute de loups. Plusieurs avaient la rage et ils devenaient hardis, descendant des hauts alpages, où ils restaient habituellement. J’ai tellement eu peur pour celle qui était devenue toute ma vie, que je me suis transformé devant ses yeux, faisant détaler les fauves. Mais Monna, elle, ne m’a ni fui, ni rejeté. Elle avait ressenti ma souffrance et ma peur, alors elle a voulu comprendre, parce qu’elle m’aimait sincèrement et qu’elle m’avait donné sa confiance. Elle m’a veillé, pendant que je dormais.  A mon réveil, elle était toujours là.

Ce fut le plus beau jour de ma vie, car elle savait désormais tout de moi.

 

EXTRAIT TIRE DE LA LEGENDE DU NORSGAAT - LIVRE III : L'EAU, EWE 

Livre disponible aux Editions du Masque d'Or, sur Amazon et Kobo

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